Silences/Noire
Au milieu de la Montagne Noire, une région isolée du Sud-Ouest, cinq personnages se retrouvent coincés par l’orage. Dans cette montagne anciennement industrialisée, la vie humaine a déserté et la nature a repris ses droits. Le temps d’une nuit, ces personnages se réfugient dans une auberge qui, auparavant, accueillait les ouvriers des usines qu’il y avait alentour. Ces cinq personnages viennent d’horizons très différents. Il y a des locaux : l’aubergiste et celui que l’on surnomme Lo Fol (« Le Fou » en occitan). Puis, il y a ceux qui viennent de la ville et qui l’ont quitté, de gré ou de force : le Danseur et Louise. Enfin, il y a Matteo, jeune journaliste qui tentait de rejoindre Carcassonne et que l’orage a contraint de s’arrêter... Suite à une coupure d’électricité, c’est le silence. la radio ne les informe plus, seul l’orage gronde au loin. Alors, coupés du reste du monde, ils en viendront à discuter, pour faire passer le temps d’abord, puis à s’interroger, consciemment ou inconsciemment.Et au centre de cette réflexion commune, la question du silence s’impose. Que représente-t-il pour chacun ? Quelles questions nous pose-t-il ? Qu’a-t-il à nous dire sur l’époque dans laquelle nous vivons ? Les personnages sortiront du cadre narratif pour retrouver une parole à travers ce silence, antérieure, rêvée, en s’évadant par la narration de récits et de souvenirs. Ainsi nous tenterons de rйpondre а ces questions aussi bien par ce texte, que nous avons écrit à quatre mains, qu’à travers sa mise en scène.
Avec
Matteo Renouf
Ambroise Divaret
Louise Moizan
Marylla Sapotille
Armane Shahryari
Mise en scène et écriture
Casimir de Carvalho
Carla Mallet
Scénographie
Création sonore
Sekhmet Sound System
Création lumière
Gidas Kervizic
Création visuelle
Théo Heldmann
Production
Compagnie Et la chorégraphie demeure
Soutien
Université Sorbonne-Nouvelle Paris 3
Note d'intention — La parole est au silence
Quelle place accorde-t-on aujourd’hui au silence ? Qu’a-t-il à nous montrer/dire de notre société ? Notamment dans notre société, envahie par la communication incessante, par un flux d’image continu ? C’est la question première qui a animé notre recherche au fil de l’écriture de ce texte, et qui la guide encore au cours de sa mise en scène. Car il semble bien que considérer ce silence protéiforme, met en évidence (un concentré de) toutes les craquelures de la société dans laquelle nous évoluons, de ce trop-plein et de ce toujours-plus qui nous entoure. Alors, comment peut-on mettre en scène cette interrogation, et tenter, sinon d’en apporter une réponse, du moins d’explorer tout ce que renferme cette thématique ? C’est là notre pari. Celui de raconter, sur la scène d’un théâtre, la vie de toute une humanité et de sa mutation à l’ère du néo-libéralisme et de la mondialisation. Comment cinq personnages, coupés du monde de façon presque apocalyptique – pris dans un orage, sans électricité, sans réseau, sans contact possible avec l’extérieur de l’auberge – peuvent-ils retrouver un espace commun et s’interroger enfin sur leur condition sur terre ? Cette réflexion s’ancre de plus dans l’histoire très concrète d’une région du sud du Tarn, fortement industrialisée au siècle précédent et actuellement à l’abandon. Une région dans laquelle le silence à beaucoup de choses à raconter et à faire raconter. C’est par une construction en cinq récits ou tableaux, que nous chercherons à mettre en scène ces questions. Nous voulons reconstruire des espaces mentaux, ces espaces où les différents personnages vont puiser leurs histoires pour se confier aux autres et partager. S’échapper du huis clos de l’auberge pour emmener les personnages – et les spectateurs avec eux – vers un espace atemporel, fait de souvenirs et de réflexions. Il s’agira de construire ces espaces à l’aide de simples objets qui, à chaque tableau, représenteront des choses différentes. Un tabouret pourra ainsi aussi bien servir de chaise que de table ou bien de place dans le métro. Le réalisme cédera la place à l’imaginaire du spectateur qui sera renforcé par l’ambiance sonore et lumineuse. Avec l’idée, peut-être, qu’au bout de la nuit il se pourrait bien que les personnages aient inventé un nouveau monde. C’est cette traversée que nous voulons proposer aux spectateurs, et leur transmettre un pouvoir d’imagination, propre au théâtre, qui permettra de penser et de construire, un jour peut-être, un autre monde.
Crédits photos : Eugenio Prieto